Tuesday, December 28, 2010

RIO DULCE, Guatemala

Faudra t'il reconsidérer l'art de voyager avec l'apparition d'outils tels que Google Earth ? J'avais passé en effet beaucoup de nuits souris en main à explorer virtuellement cette région où il n'y avait pas de routes et où les seuls tracés en courbes existant n'était que des canaux au coeur de jungle et forêts, pour finir dans une ville du bout du monde : Rio Dulce. La vérité serait elle différente ? De ce que j'en avais lu il s'agissait d'une ancienne ville coloniale bâtie autour d'une forteresse, lieu de villégiature de nombreux plaisanciers désireux de s'abriter des vents hivernaux.
Livingston a cette délicieuse particularité de n'être accessible que par bateau (ce qui diminue considérablement le taux de criminalité du lieu). Venu de la mer, je repars par le fleuve pour rejoindre Rio Dulce. La voie fluviale est aussi recommandée afin d'admirer les magnifiques canyons aujourd'hui illuminés d'un soleil régénérant. En effet depuis quelques jours beaucoup de fronts froid font chuter les centigrades et incitent les locaux à porter d'épais bonnets de laine, toujours étonnant au coeur des Caraïbes.
Au coeur du canyon, la barque file à toute vitesse en prenant de larges tournants, ce qui amuse énormément mes voisins expatriés guatémaltèques vivant à Montreal, revenus pour Noël. Cette euphorie de kermesse nous laisse à peine le temps d'apercevoir des maisons traditionnelles en palmier et bambous devant lesquelles des mères de famille assises dans de longilignes coquilles de noix affleurant dangereusement la surface secouent une ligne de pêche en quête de menu fretin.
Il semble que la famille ait loué le bateau pour une visite des lieux puisque nous nous arrêtons dans les sources chaudes, une des étapes obligées dans les guides touristiques.
Déposé à Isabal j'ai la mauvaise surprise de voir qu'en ce jour de Noël, férié, l'unique bus pour El Estor est parti depuis le matin. Il faudra donc que je couche à Rio Dulce qui est à peu près aussi attrayant que d'arriver dans la banlieue de Clermont-Ferrand un soir de février. La ville en effet ne ressemble à rien. Deux bouts de population sont séparés par un immense pont qui grimpe en courbe jusqu'à peut être 70m de haut (suffisamment de quoi couper les jambes).
Rio Dulce est un port mais surtout une marina ainsi cohabitent de grands bourgeois venus de la capitale et quelques 600 voileux venus du monde entier, dont plus de la moitié sont des bateaux-ventouses (qui sortent peu en mer) habités par de vieux hippies aux chapeaux de mousquetaire excentriques ou ornés de bandeaux colorés et de lunettes Varilux tels des sosies de Antoine, notre baba cool national reconverti dans la promotion d'optiques bon marché.
Après m'être pris une petite montée de frayeur en traînant mes guêtres dans un chosas, un petit bar de quartier réservé aux hommes (avec une serveuse sur-bonne évidemment) où un ancien narco-trafiquant qui m'avait pris en amitié tout en crachant toutes les 45 secondes me réclamait maintenant de lui donner de l'argent afin qu'il puisse continuer à boire aussi je filais me réfugier dans ma chambre d'hôtel équipée d'un petit poste de télévision pour m'offrir une autre sorte d'évasion.
La télévision d'Amérique Latine comprend (cable inclus) quelques 120 chaînes où se trouvent le pire du pire. A coté de programmes étonnants comme cette chaine colombienne musicale et chrétienne, où un type qui ressemble à Ben Harper chante son amour de Jesus, il y a les novelas criminelles où ça bastonne et défouraille sec filmés tout en plan moyen avec un effet Cinéma posé sur une vidéo tournée avec une caméra bon marché et des acteurs qui louchent sur un prompteur.
En règle générale une chaine commerciale se remarque par le nombre hallucinant d'images à la seconde, tout va ainsi très très vite ne laissant au téléspectateur pas le temps de penser. Même pendant un reportage les infos sont mâchés en bouillie, une voix off annonce une décision prise par une des protagonistes, suit la protagoniste qui témoigne que Oui elle a bien pris cette décision. A signaler évidemment qu'auparavant cette décision aura déjà été soufflé par un jingle avant la page de publicité. C'est le gavage de l'oie intégral.
Demain direction El Estor et son incroyable réserve de lagune, le spot fantasmé sur Google Earth..